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J’ai longtemps souffert d’un mal ordinaire : je suis perfectionniste. En ce sens, j’ai souvent couru après l’illusion d’être une personne parfaite, d’avoir une vie parfaite, d’être en relation avec des personnes parfaites. On ne s’imagine pas à quel point courir après la perfection peut être épuisant. Vivre un échec? Accepter ses erreurs? Non,, ce n’est pas à l’ordre du jour. Le perfectionniste a trop d’attentes et d’exigences pour s’adonner au lâcher prise. A la maison, au travail, le perfectionnisme prend contrôle dans tous les domaines de vie. Cela demande beaucoup de vigilance, pour qu’une autre partie de soi ne vienne pas saboter cette autre partie dont l’image de soi est si maîtrisée.

Il est un film d’animation (Disney/Pixar) qui nous interroge sur notre être, le fonctionnement et la gestion de nos émotions, sur ces différentes parties de nous qui cherchent à se libérer. Il s’agit d’Alerte Rouge. Dans ce film, Meilin Lee (dit « Mei Mei ») est une brillante adolescente de 13 ans. Tiraillée entre son image de petite fille parfaite et d’adolescente en devenir, elle se transforme en panda roux chaque fois qu’une émotion la traverse. Ce panda, c’est comme une partie d’elle-même émotionnelle, celle qui apparaît quand elle vit un épisode émotionnel fort.

Vous en conviendrez, quelle que soit la génération, que ce soit à l’adolescence ou à l’âge adulte, apprivoiser cette part de soi est un défi. Nier ses émotions pourrait être séduisant pour le perfectionniste, pour donner à voir une image de soi toujours impeccable et maîtrisée, sauf que, ce n’est pas une voie valable pour une vie sereine et épanouie…

Ces émotions qui nous tiraillent

 

Mei Mei voit apparaître son panda la première fois dans une situation où elle ressent de la honte. Remettons-nous dans le contexte. Mei Mei est une charmante adolescente obéissante, plutôt en confiance et avec une bonne estime d’elle-même,  qui excelle dans tous ses domaines de vie. Un soir, alors qu’elle fait ses devoirs, elle se met à dessiner frénétiquement un jeune homme. Que se passe-t-il pour elle ? Ressentirait-elle du désir pour celui-ci ? Sa mère, Ming, découvre ses croquis. Face à cette réalité, la maman est horrifiée. Elle reconnaît le jeune homme qui travaille au supermarché du coin et emmène sa fille sur le lieu de travail de celui-ci lui demander des explications. Les personnes en présence montrent l’adolescente du doigt en riant. Les moqueries fusent de partout. Elle a honte. L’émotion est si forte. Le lendemain, elle se réveille sous la forme du panda.

 

Soit dit en passant, l’adolescence, c’est l’âge de la tendance à la honte, question de génération. Si tu t’habilles de cette façon, c’est la honte… Si tu écoutes telle musique, c’est la honte… Et si tu te comportes comme ceci, c’est la honte… Toutes les interactions pourraient se résumer à cette émotion profondément sociale : la honte. Rajoutons à cela les émotions primaires comme la colère, la tristesse, la peur ou le dégoût avec encore une dose d’émotions sociales comme la culpabilité, la jalousie ou l’envie, bonjour le cocktail, bienvenue dans la vie !

 

A première vue, les émotions sont bien compliquées à comprendre, à accepter, à apprivoiser, elles tiraillent trop. C’est compliqué pour l’adolescent et pour son parent. Comme beaucoup d’adultes ne savent pas apprivoiser leurs parts émotionnelles, il apparaît naturel de contraindre leur progéniture à nier les leurs. Par conséquent, certains adolescents font en sorte d’annihiler cette part de panda excentrique pour arborer leur costume « d’adulte ».

 

Enfiler son costume d’adulte

 

Mei Mei étant une adolescente, on pourrait se dire en tant qu’adulte que nous ne sommes pas concernés par cette part émotionnelle de nous, voire qu’elle n’existe pas. Pour la plupart d’entre nous, on se souvient bien qu’à l’adolescence nous nous sentions comme submergés par toutes ces informations, ces émotions qui passent par notre corps. A cet âge, tout est important, le corps est comme en ébullition. C’est vivant, vibrant et malaisant aussi. L’émotion, le sentiment est vécu comme un problème. Pour beaucoup, nous avons eu vite fait de vouloir enfiler un costume d’adulte. Enfiler son costume d’adulte, cela signifie de mettre totalement de côté « son panda », c’est nier ses émotions.

 

L’exemple de Ming

Ming, la mère de Mei Mei, a, elle aussi, connectée avec son panda à l’adolescence. Comme les femmes de sa lignée, elle a choisi par un rituel de se débarrasser de son panda. D’ailleurs, se débarrasser est un grand mot, disons que le panda reste présent dans des couches subtiles de l’existence. Il est gardé sous contrôle via un objet symbolique, tel un génie avec une lampe magique. On constate tout au long du film, que souvent en proie à la colère, les émotions de Ming ne sont pas apprivoisées, acceptées. Aussi, elle a connu des problématiques de relation et de loyauté avec sa propre mère, problématiques non résolues à l’âge adulte. Une part d’elle restait convaincue qu’elle ne ferait jamais assez bien et qu’elle décevrait toujours sa mère.

Sous couvert du perfectionnisme ou de ce que l’on pourrait attendre d’un adulte, Ming s’impose une vie routinière, cadrée à outrance et pense que c’est cette voie que sa fille doit suivre, voire copier. Ce qui semble être la voie la plus simple, la plus facile, avec le moins d’embûches s’avère finalement être un leurre. Nier une part de soi pose plus de difficultés et d’anxiété sur le long terme que de l’accepter. Encore trop de personnes, et pas que les perfectionnistes, confondent « intelligence émotionnelle » et « ne rien ressentir ».

 

Gérer ses émotions ne signifie pas que l’on ne ressent plus rien. Cela signifie que l’on est à même de les accueillir, de les comprendre et de répondre à leurs besoins, c’est tout à fait différent que d’être dans le déni. Enfiler un costume d’adulte, ce n’est définitivement pas devenir adulte. Pour devenir adulte, il convient de reconnaître, d’accepter et de « jouer » avec les différentes parts de soi, de leur donner de la place et une écoute particulières.

 

Reconnaître, accepter, jouer et être

 

Mei Mei choisit une voie différente que celle des femmes de sa lignée. Elle choisit d’aimer « son panda », de jouer avec et de le vivre à découvert comme faisant partie de son identité. Sachant compter sur l’acceptation inconditionnelle de ses amies, la jeune fille joue avec ses parts émotionnelles de manière très naturelle. Son « panda » est une partie d’elle reconnue et acceptée à part entière.

 

L’exemple de Mei Mei

Elle ne cache pas son panda. Au contraire, elle l’exploite avec fierté. Effectivement, il y a de quoi être fière de choisir le chemin de l’intégrité. Plutôt que de se nier ou de renier des parties d’elle, elle fait le choix totalement conscient d’assumer une partie d’elle. Pourtant, les adultes lui signifient que cette part de soi est difficilement contrôlable car un peu sauvage, que cette part d’elle-même doit être cachée. Pourtant à jouer avec les particularités de son panda, elle explore sans œillères toutes les parties d’elles qui veulent s’exprimer. Dans cette acceptation, nous pouvons constater que l’adolescente apprend à gérer intelligemment ses émotions.

 

Rappelons-le, une émotion n’a pas pour fonction de saboter notre être. Une émotion est intelligente et elle informe. Par exemple, la peur permet d’éviter les dangers, la colère de surmonter les obstacles, la tristesse permet de réfléchir et de chercher du soutien, le dégoût permet de mettre à distance ce qui est perçu comme mauvais, la joie accroît l’énergie et se partage. Nos émotions nous appartiennent, elles sont à notre service. C’est ce que Mei Mei expérimente à travers son panda.

 

 

En guise de conclusion

 

Les émotions nous informent sur nous, les reconnaître ; les comprendre, les accepter nous permet plus de jeu et de joie d’être dans notre vie. « On ne peut pas mettre le vent en cage » dit le proverbe, les émotions c’est pareil. Maintenant je dirais, « on ne peut pas mettre son panda en cage ! » Suivons la voie de Meilin  qui nous met au défi à la fin du film : « On a tous une créature cachée en nous, on a tous une facette compliquée, embarrassante, bizarre et le plus souvent on ne la laisse pas s’exprimer. Moi, je l’ai fait. Et vous ? »  Mon panda, mon choix ! 😉

 

 

Les petits trucs de Mam’coach

  • Le fim Alerte Rouge est aussi une merveilleuse ode à la relation mère/adolescente, il est une invitation à la bienveillance dans l’acceptation de soi, de l’autre, de ces adultes en devenir. Regarder ce film est en soi une expérience enrichissante, questionnante, réparatrice aussi.
  • Veiller à porter une attention spécifique à son corps, à son ressenti, comprendre et accepter plutôt que de chercher à contrôler. Pour ce faire, faites votre météo intérieure : ce que je pense – ce que je ressens – ce que je sens dans mon corps. Puis, respirez profondément.
  • Se demander : quels messages contraignants ai-je reçu enfant ? Qu’est-ce qui n’est plus à mon service aujourd’hui ? Quelles permissions ai-je besoin de me donner pour pouvoir mieux vivre aujourd’hui ?
  • Repérer vos séquences émotionnelles. Lorsque vous vivez une situation qui vous cause une émotion, penser un prendre un temps pour vous questionner et noter vos réponses. Quel est le déclencheur (interne, externe) ? Quelles sont vos réactions physiologiques ? Quel comportement avez-vous eu en réaction ? Quelles sont vos pensées sur le moment ? Qu’est-ce que vous vous dites ? Quelle pensée contenue d’entretenir l’émotion ? De quelle émotion s’agit-il ? Quels sont les besoins à satisfaire de cette émotion ? Comment et quand allez-vous satisfaire cette émotion ?
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